Le 26 février, CulturistiQ animait un atelier au Rucher Créatif de Troyes sur les offres et initiatives du tourisme durable, dans l’objectif d’inciter les participants à réfléchir sur leurs pratiques touristiques.
En 2017, 1.322 milliards de touristes ont été comptabilisés dans le monde (+7%), représentant 10% du PIB mondial et 300 millions de postes. Les villes les plus touristiques sont européennes : Londres, Paris, Berlin, Rome, Madrid, Barcelone (source Revue Espaces n°344 sept-oct 2018). ADP entreprend à l’aéroport de Roissy en 2019, les premiers travaux sur la construction d’un terminal 4 qui comptera 40 millions de passagers par an… Des chiffres qui inquiètent les destinations quant aux dérives possibles en termes de qualité de vie des habitants, mais aussi de respect des environnements et ressources locales.
Les constats d’une augmentation des offres de voyage, des modalités de transport, de la fréquentation des sites touristiques avec l’ouverture de site patrimoniaux de plus en plus nombreux, invitent à repositionner sa manière de « consommer » ces lieux, dans un contexte de réchauffement climatique et de surconsommation touristique, le « surtourisme » ou « overtourism ».
Ce n’est donc pas un hasard si 2017 a été proclamée « année internationale du Tourisme Durable pour le développement » par l’ONU. Face à ces déferlement de touristes, les villes ou destinations s’organisent pour réguler, éduquer et repenser le tourisme autour de pratiques plus responsables. Voyageons Autrement en offre une belle perspective dans son blog. Son ouvrage « 10 ans de tourisme durable » paru en 2018 aux éditions IDCROISE, définit le tourisme durable comme étant « l’ensemble des pratiques touristiques engagées pour trouver des voies d’amélioration sur trois piliers : environnement, économie et social ».
Quelques exemples de ces initiatives engagées et réussies ont été abordés lors de cet atelier, pour montrer que le tourisme durable est l’affaire de chacun, consommateurs, réceptifs, politiques, entreprises, associations…
A l’origine issu d’initiatives privées ou associatives, le défi est aujourd’hui relevé par de grands groupes du secteur touristique et correspond de plus en plus à des volontés politiques : c’est le cas par exemple de l’écosystème mis en place autour de l’ouverture du Louvre Lens qui réinvente un territoire abîmé, de Troyes la Champagne qui s’ouvre sur les valeurs de convivialité et d’authenticité autour du slow tourisme, ou encore plus récemment en 2019, la ville de Lyon, classée capitale de l’Europe du Tourisme Durable, avec la création de chartes de bonnes pratiques, une législation sur les logements meublés airbnb, un aéroport neutre en carbone…
De nombreux labels invitent le voyageur à plus d’éthique dans ses choix de voyage ou de destination (Grands Sites de France, Parcs Naturels Régionaux…). Des offres professionnelles émanant de TO ou d’associations, répondent aussi à ce besoin de pédagogie, de respect et de partage de bonnes pratiques : dans le cadre du tourisme participatif ou collaboratif, les exemples des Greeters, du Couchsurfing ou du WWOFING pour une expérience de volontariat, mettent en avant le rôle des habitants en tant que facilitateurs de la destination. En développant la valorisation du territoire par ce type d’engagement, l’humain est remis au centre de la pratique touristique. Ce sentiment d’appartenance contribue à l’accueil, au partage, à l’échange et à la « protection » de la destination.
Des festivals comme No Mad Festival, des plateformes locales comme Moodyx, Insolite Travel ou internationales et collaboratives comme Voy’agir ou Library Planet, proposent des offres variées et valorisent des savoir-faire ou des thématiques de voyage choisies. Le numérique est souvent synonyme d’accompagnement de soutien et de visibilité dans ces propositions d’offres, propices à la rencontre et à la mobilité. Certaines initiatives comme Babel Voyages ou Bastina proposent des offres de voyages éthiques, et parfois des balades urbaines qui valorisent les cultures tout près de chez soi. Des hôtels savent se réinventer comme Nomad Hotels ou maintenir une longueur d’avance dans l’hôtellerie responsable de luxe comme Inkaterra au Pérou et CayugaCollection au Costa Rica. L’idée étant de favoriser les retombées locales de l’économie touristique.
La mer, la montagne se repensent peu à peu autrement que sur le seul critère du tourisme de masse. Le tourisme devient expérientiel pour désenclaver et favoriser un meilleur ancrage territorial : la Baie de Somme invite à des cueillettes guidées de salicornes et découverte de sa faune pour éviter le risque d’abus grâce à l’éducation. La création de très nombreuses voies cyclables qui traversent la France (La Vélofrancette) invite à une mobilité et des visites différentes. Le pari du culturel pour une meilleure répartition du tourisme (20% des territoires concentrent 80% des visiteurs) comme l’Espagne avec le musée des Sciences et Techniques de l’arrière pays catalan ou la participation des touristes à la valorisation du street art dans le 93, en sont également de bons exemples.
Parvenir à penser, créer et vivre le tourisme avec cette vision à long terme d’une responsabilité commune en conciliant voyage, découverte, plaisir, respect et rentabilité, semble finalement réaliste, non?